mardi 10 décembre 2013

Lettre des journalistes précaires de Radio France aux membres du CSA

Cette lettre a également été envoyée aux parlementaires membres des commissions des affaires culturelles (Sénat et Assemblée Nationale).
 

Paris, le 10 décembre 2013,

Mesdames et messieurs les membres du Conseil Supérieurs de l’Audiovisuel,

Dans quelques semaines, vous auditionnerez les candidats à la présidence de la société Radio France, qui vous proposeront un « projet stratégique » pour notre belle maison. Cette maison, c’est aussi nous, la centaine de journalistes précaires du planning de Radio France, qui la faisons vivre. Sans nous, pas d'antenne les nuits, les week-ends, les jours fériés et les vacances scolaires. Sans nous, pas moyen de remplacer les congés maladies, maternité et les congés tout courts des journalistes titulaires.

Pour cela, nous cumulons les CDD, parfois plusieurs centaines, pendant de nombreuses années. Pour cela, nous sommes prêts à mettre entre parenthèses nos vies personnelles pour être disponibles à tout moment et partir pour des contrats dans l'une des radios du groupe partout en France. Pour des CDD d'un jour ou de plusieurs semaines.

Notre situation s'est encore fragilisée depuis novembre 2012 lorsque Radio France a choisi d'ajuster ses contraintes budgétaires sur notre dos, en diminuant drastiquement le volume de CDD. Nous nous enfonçons ainsi dans la précarité sans garantie d'embauche à terme, cumulant pour certains journalistes jusqu'à plus de 200 CDD.

Comment expliquer qu'un système de précarité régulièrement condamné par les tribunaux continue d'exister dans une entreprise de service public ?

Comment justifier qu'une partie de la redevance des citoyens français serve à indemniser des journalistes précaires ayant servi la maison depuis plus de cinq ans et qui se trouvent brutalement remerciés ?

Comment accepter que Radio France détourne le principe d'indemnisation de Pôle Emploi en le laissant compléter nos revenus les mois où nous travaillons peu ou pas ?

Cette situation dure depuis des années, et nous, journalistes précaires, la dénonçons depuis bientôt un an. Nous souhaitons engager des discussions, nous asseoir à une table et envisager une réforme nécessaire de ce "planning" que Radio France présente comme une étape obligatoire.

Nous avons alerté le ministère de la Culture sur nos conditions. Le cabinet de Madame Filippetti a jugé utile de nous recevoir et plaide pour l'ouverture de négociations. La direction de Radio France, elle, n'a jamais daigné nous répondre.

Alors, lorsque vous auditionnerez les candidats à la présidence de Radio France, Mesdames et Messieurs les membres du CSA, peut-être pourriez-vous leur demander si la situation des journalistes précaires de Radio France leur semble digne d'un audiovisuel public exemplaire.

En vous remerciant de l'attention que vous porterez à notre courrier, nous vous prions d'agréer l'expression de nos sentiments respectueux.

Le collectif des journalistes précaires de Radio France.

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